LES YEUX CLOS
bateau de papier
sur un filet d’eau
les plus beaux voyages
se font les yeux clos
Source d’inspiration :
https://www.arte.tv/fr/videos/107472-000-A/les-neiges-du-kilimandjaro/
UN TIROIR SANS FOND
je voudrais me reposer
proclamer la source tarie
prétendre que tout est fini
que je peux m’en tenir là
d’ailleurs la source est bien tarie
plus rien n’irrigue le voyage
mais le temps coule toujours
dans mon petit sablier
mais les mots tombent toujours et encore
grêle de mouches impatientes
c’est un temps de phrases sèches
extraites d’un tiroir sans fond
d’un gisement qui m’épuise
moi qui voudrais me reposer
AU CŒUR
[vivre]
je vis au cœur d’un feu de joie
sans joie ni feu à partager
[voir]
je vis au cœur de la forêt
un arbre qui prenait la fuite
[viser]
je vise au cœur et puis je tire
sans jamais atteindre ma cible
L'enfant qui lit par-dessus mon épaule proteste : « C'est même pas vrai, y a pas un nuage aujourd'hui ! »
Oui, j'ai un enfant qui lit par-dessus mon épaule. C'est agaçant. Exaspérant même, car dès que je me retourne, il disparaît comme par enchantement.
À propos d'enfance (un poil trop long pour tenir dans un pouet) :
gemini://dvd.flounder.online/textes/trembler.gmi
ou :
JOUR DE PLUIE
aujourd’hui c’est jour de pluie
tout ce qui peut pleuvoir
et même ce qui ne devrait pas
s’averse se déluge sans discontinuer
il pleut des histoires de pluie
il pleut des ombres grimaçantes
il pleut des cris et des colères
il pleut même un peu d’eau grise
et voilà qu’il me pleut
milliers de gouttes de moi tombent de haut
s’étalent sur le sol en flaques de moi
et tout ce moi perdu s’en va grossir le ruisseau
long ruisseau des choses défaites
aujourd’hui c’est jour d’exil
HORS D‘ÉQUERRE
je suis le clou planté de guingois
est-ce à cause de moi que le bois se fendra
à cause de moi seul que le malheur viendra
et la colère et la fragilité
est-ce à moi de m’en excuser
allons allons
adressez-vous plutôt au marteau qui m’a si mal planté
à la main qui tenait le marteau
au maladroit dont le bras se termine par cette main
UN TEXTE QUI NE CASSE RIEN
se saisir du mot pierre
d’une voix ferme et puissante le lancer contre le mot vitrine
constater l’absence de dégâts
se perdre en conjectures sur la cause de cet échec
admettre à contre-cœur qu’on n’a aucune chance
de s’emparer un jour du mot bijoux
INEXORABLEMENT
chacun des mots que je prononce ou que j’écris me rapproche de toi
voilà comment je pave mon propre chemin
ce n’est pas ce que je veux
mais c’est pourtant ce qu’il faut faire je le sais bien
je pave mon chemin avec les mots qui te bâtissent
je sais aussi qu’au bout du compte mon amie
quand il ne me restera qu’un souffle pour toute expression
c’est toi qui poseras l’ultime pavé du chemin
LE VRAI SOMMEIL
je fais les poches de la nuit pour trouver le sommeil
le vrai sommeil
celui des voyages au long cours
celui dont les traces perdurent
floues et trompeuses mais vivantes
Je viens de créer une « capsule » Gemini et j'ai commencé à la remplir de textes :
J’ai vu de la lumière, alors je suis entré.
J’ai rencontré des gens sympas, alors je suis resté.